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Les tanneries de Fès !

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Mar 18, 2014 Maroc , , 7 Comments

Fès est une petite capitale de l’artisanat. Visiter la médina, c’est découvrir des gestes et savoir-faire disparus chez nous depuis plusieurs décennies. Que ce soit le cuir, le bois, les métaux ou la terre : tout se transforme pour devenir des objets qui font la réputation de Fès depuis des centaines d’années.

La maroquinerie est l’un des artisanats majeurs de la ville, de la vente de la peau jusqu’à la confection de babouches ou autres blousons, toutes les étapes du processus de fabrication ont leurs artisans qui, précisons-le, n’ont pas des métiers faciles.

Visiter les tanneries est un incontournable lors d’un séjour à Fès. Découvrir ces centaines de cuves où baignent les peaux de bêtes, en pleine médina,  est un spectacle incroyable.

Ça, les locaux l’ont bien compris, tout comme le fait que nous (les touristes) galérons à trouver notre chemin dans les ruelles pentues de la ville. Impossible de les éviter, des « rabatteurs » nous proposent gentiment de nous emmener jusqu’aux tanneries. Assez naturellement, ils nous demandent si on souhaite voir les tanneries depuis une terrasse. Vu que ce n’est jamais vraiment clair, je précise dès ce moment que je n’ai pas l’intention de payer ou acheter quoi que ce soit. Car le passage par la case boutique ou porte-monnaie semble inévitable… « Pas de problème monsieur, vient voir la terrasse, c’est gratuit ». Bien entendu on passera par une boutique et bien entendu je n’achèterai rien.

De là-haut la vue est superbe : les toits de la vieille ville s’offrent à nous et on surplombe les tanneries avec ces cuves qui forment un décor moyenâgeux : la photo est inévitable! De ces terrasses, on prend le temps d’apprécier les différentes étapes que demande la préparation du cuir mais il est impossible de s’approcher et les tanneurs sont contre la prise de photo pour la majorité d’entre-eux.

Ces gestes forment un patrimoine culturel riche, il m’était impossible de me contenter de quelques photos « volées » depuis une terrasse, je voulais absolument découvrir ces métiers de plus près.

Comment faire ? J’ai tout simplement cherché quelqu’un pour m’y introduire. Quand on voyage, il y a souvent un local souriant avec qui l’on sympathise. Vous n’êtes pas sans savoir que j’aime donner des photos à ceux qui m’ont aidé, offert de leur temps pendant mes voyages , ce qui me facilite le contact. J’ai donc demandé à Mohamed avec qui j’ai passé un après-midi à discuter au café et à jouer au billard (au café Nejjarine, non loin de la place du même non), s’il connait quelqu’un qui travaille dans l’une des trois tanneries de Fès. Bingo, son oncle Larbi y travaille, il y a passé ça vie! Le rendez-vous est fixé, le lendemain nous irons rencontrer Larbi.

Il est 10h quand je retrouve Mohamed au café Nejjarine. Le temps d’un café-clope, il m’explique qu’il prend un risque en m’accompagnant jusqu’à la tannerie. Le problème n’est pas la visite de la tannerie, mais le trajet. Les marocains qui n’ont pas de carte officielle de guide ne peuvent accompagner les touristes dans la médina. Une police touristique, dont certains représentants sont en civil, rôde. Ce sera simple, il marchera cinq bons mètre devant moi. Sa casquette rouge me servira de repère, je n’aurais qu’à la suivre jusqu’à la tannerie.

Quand nous arrivons, l’odeur est bien plus forte que du haut de la terrasse. Dans certaines cuves, les peaux baignent dans un mélange à base de fiente de pigeon. La technique est on ne peut plus traditionnelle !

Seuls les colorants utilisés sont modernes, la majorité des tanneurs utilise des produits chimiques et rares sont ceux qui fabriquent leurs colorants à partir de produits naturels.

Je suis Mohamed à l’intérieur de l’un de ces bâtiments qui entourent les bassins, nous montons un escalier sombre dont les marches sont toutes de hauteur différente. « Attention la tête! » me dit-il. En effet, il y a des pièges! Nous arrivons à l’étage où Larbi travaille dans son atelier. La pièce doit faire 3 mètres sur 3, il y a un banc en bois, une ampoule et ses outils.

Larbi est né à Fès il y a 74 ans. Depuis qu’il a 14 ans, il travaille dans les tanneries. 60 années pendant lesquelles il a fait tous les différents métiers que l’on peut découvrir ici. De l’abattoir où il allait acheter les peaux jusqu’à la vente du cuir à l’artisan qui fabrique les objets. « De la première à la dernière étape » me dit-il. Vous comprendrez que s’il travaille encore aujourd’hui, ce n’est pas par passion mais par nécessité. Il a 7 enfants, et de nombreux petits enfants… Quand je demande combien, il hésite et me dit finalement : « Beaucoup! » en rigolant.

J’ai observé les gestes de Larbi pendant quelques instants, il était fier de me montrer son savoir-faire. Il répète le même mouvement avec minutie. La lame de son outil doit raser un tas de peaux de chèvre, chameau, vache ou mouton aujourd’hui. Il est ce qu’on appelle un peaussier. Avec un français incertain il m’a demandé si je voulais un thé. « Oui, pourquoi pas. Et toi, tu veux une photo souvenir? ». Je ne pouvais partir sans lui offrir un portrait. Le temps de notre thé, le Polaroid se révélait dans sa boite. Et comme d’habitude, avant de poursuivre mon chemin, j’ai immortalisé la photo lovée aux creux de ses mains.

Cette expérience restera l’un de mes plus beaux souvenirs de ce #TajineOuCouscous (nom donné à ce voyage). N’oubliez pas qu’il faut prendre le temps en voyage, sans lui il nous est impossible de vivre et déclencher ce genre de rencontre. Un passage rapide dans cette ville ne m’aurait offert qu’une belle vue depuis une terrasse…


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